30 novembre 2012

Quand CA Cheuvreux prédisait 6 mois à l'avance les décisions du Président Hollande > P

Lorsque je travaillais en direction de marché au siège du Crédit Agricole, mes collègues et moi recevions régulièrement des notes de conjoncture écrites par les économistes de Cheuvreux (l'un des plus importants brokers-conseils européens, appartenant au groupe CA). J'ai toujours aimé la lecture de ces notes : elles étaient claires, très directes, fouillées, souvent d'une grande intelligence et d'une logique imparable. À mille lieues des circonvolutions indigestes que l'on peut lire dans la presse ou pire, dans les analyses économiques réalisées au sein des officines des grands partis politiques. Très loin des débats de Polichinelle qui s'étalent à la télévision dans les émissions "politiques" où des experts, toujours les mêmes, n'apportent aucune lumière et pour cause : s'ils le faisaient, chacun pourrait réfléchir par lui-même, ce qui est tout à fait rédhibitoire pour un expert payé pour réfléchir au compte des autres.

Bref, ces notes de Cheuvreux étaient "cash", à tous les sens du terme. Je les attendais avec une sincère impatience. 

Il y a quelques mois, nous étions alors en pleine campagne présidentielle, François Ruffin, un journaliste des Mutins de Pangée (une coopérative audiovisuelle à découvrir si vous ne connaissez pas) est "tombé"sur l'une de ces notes de Cheuvreux. Je me met à sa place : lire pour la première fois une note de conjoncture du broker-conseil d'un grand établissement bancaire peut vous laisser quelques instants en suspension, grisé comme si vous découvriez tout à coup un trésor ou une martingale... Nous sommes tellement accoutumés par les journaux à ne ne lire que des textes abscons ! Je pense que plus on descend dans les hiérarchies stratégiques de nos sociétés, plus le langage se fait brumeux, inopérant,  inefficace. Et à l'inverse, plus on remonte, et plus on parle de façon directe, sans ambages, avec le souci d'être compris et de ne pas perdre de temps (le sien et celui de ses partenaires). La "parler cash" est la langue des environnements où l'on décide.

La note de Cheuvreux "découverte" par François Ruffin a été rédigée (en anglais) par Nicolas Doisy, Chief economist à Chevreux et date du 8 mars 2012 : en voici une traduction. Comme souvent dans ce type de note, il s'agit d'une évaluation de probabilités en fonction de variables d'environnement. En la circonstance, ce qui est évalué, c'est l'environnement politique suite à une période d'instabilité (l'élection présidentielle) : les choix que prendrait François Hollande s'il était élu.

Je vous laisse apprécier la pertinence de cette analyse et la qualité de son anticipation.

Extraits choisis :

"Lorsqu'il sera élu le 6 mai, comme c'est probable, le socialiste François Hollande devra clarifier sa position sur deux questions urgentes : l'austérité budgétaire et la réforme du marché du travail. En effet, sur ces deux points, il est resté quelque peu silencieux et / ou évasif concernant ses intentions pour des raisons purement électorales : il ne veut pas mettre en péril le soutien dont il jouit de la part de son électorat et donc risquer de perdre l'élection pour être trop transparent." 
"Cette position ambiguë reste sensée jusqu'à ce que les élections présidentielles et législatives soient passées, car une clarification dès maintenant repousserait l'électorat populaire vers les extrêmes." (...) 
"L'objectif primordial de la France sera de rester dans la zone euro, mais aussi, et surtout, de continuer le jeu du bloc coopératif avec l'Allemagne. Au cours des trois dernières décennies, depuis le «tournant de la rigueur» de 1983, cet objectif a été aveuglément poursuivi par tous les présidents français (à commencer par François Mitterrand), même au prix d'un chômage élevé. François Hollande ne fera sûrement pas exception à cette règle. " 
"Très malheureusement pour François Hollande, la nécessité de libéraliser le marché du travail est le résultat direct de l'appartenance à la zone euro, de sorte que l'un ne peut aller sans l'autre. " (...) 

"À cet égard, il pourrait s'avérer politiquement utile que ses pairs de la zone euro laissent Hollande simuler l'obtention de concessions de leur part, même si cela reste hors de propos dans la réalité. La demande de Hollande pour une renégociation du Traité serait donc utilisée pour tromper le public français afin de lui faire avaler des réformes au goût moins agréable, incluant le marché du travail. Lui permettre de faire valoir l'intégration de sa politique de croissance serait donc un simple édulcorant politique."

Là, impossible pour moi de ne pas vous renvoyer à mon dernier billet politique : Lettre à mes comparses et feu camarades socialistes qui ont une fois de plus voté oui à un traité injuste et injustifiable.

L'histoire ne s'arrête pas là. François Ruffin a, à l'époque, obtenu un entretien avec Nicolas Doisy (rédacteur de la note), lequel répond à ses questions avec une sincérité et une efficacité que l'on imagine coutumières, même si, au fur et à mesure de l'entretien, ses regards se tournent vers la fenêtre avec une certaine envie, peut-être un peu de gêne, comme s'il venait de comprendre que parler à ce journaliste est déplacé et finalement vain : il n'est pas de ceux à qui l'on parle cash, non pas parce qu'il ne peut pas comprendre, pas non plus parce qu'il est manifestement de la gauche rouge, mais parce qu'il n'est pas du monde de la finance : à quoi bon lui expliquer la vérité des choses puisqu'il ne pourra en faire que des mots (ce n'est qu'un journaliste) et certainement pas prendre des "options" d'investissement ou de placement (comme les lecteurs à qui sont destinées les notes de CA Cheuvreux). À quoi bon perdre son temps à parler vrai à ceux qui, de toute manière, sont économiquement impuissants ? Cette pensée n'est pas celle de Nicolas Doisy. C'est celle que je lui prête. Mais mon expérience de la banque me pousse à croire que je ne dois pas être loin du compte.


Très sincèrement, je tire mon chapeau à cet économiste. Quasiment toutes ses "prédictions" se sont révélées exactes par la suite. Durant quelques instants, j'ai retrouvé la joie de lire une analyse économique claire, lucide et directe, telle que Cheuvreux en produit régulièrement. Le genre d'analyse que la presse grand public ne publie quasiment jamais. 


Et pour vous faire votre propre idée, voici le reportage de l'entretien réalisé avec le chief economist de CA Chevreux :


01 novembre 2012

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Deux histoires, deux euros. 
Et plus aucune excuse de ne pas me lire !
:)